top of page
Photo du rédacteur- Jacques COLLOMBIER

3/4 Convention collective : quels risques encourt l'employeur ?

Dernière mise à jour : 28 avr. 2020


Si l’INSEE n’a pas fait d’erreur de codification et si le code APE attribué relève d’une autre Convention collective (CCN) que celle appliquée dans l’entreprise (ou si l’activité principale réelle 🔗 de l’entreprise ne correspond pas à la CCN appliquée), quels sont les risques juridiques et de sanction pécuniaire pour l’employeur ? Peut-on les quantifier ?


Par exemple :


Une entreprise applique la CCN de la Métallurgie alors que son code APE relève du champ d’application de la CCN des Bureaux d’Etudes Techniques.


Imaginons qu’un jeune ingénieur, salarié de cette entreprise depuis 12 mois, décède suite à un accident de la route. Il est marié et il a deux jeunes enfants de trois et un an. Sa rémunération annuelle est de 24 000 € brut.


Le contrat de « prévoyance cadre » mis en place dans l’entreprise prévoit le versement de 300% du salaire brut annuel en cas de décès. Soit 72 000 €. Ce contrat est parfaitement conforme à la CCN de la Métallurgie et également conforme à la CCN des Ingénieurs et cadres de 1947.


Toutefois, si cette même entreprise avait contracté un contrat de « prévoyance cadre » conforme à la CCN des Bureaux d'Etudes Techniques (BET), les garanties minimales auraient été bien supérieures :


  • Capital décès : 170% du SAB (Salaire Annuel Brut) avec un minimum de 340% PASS (Plafond Annuel de la Sécurité Sociale) soit 137 782 €

  • Rente éducation jusqu’au 17 ans de chaque enfant : 12% SAB minimum 24% PASS soit 9 726 €/an

  • Rente éducation de 18 à 26 ans inclus pour chaque : 15% SAB minimum 30% PASS soit 12 152 €/an

  • Soit un montant total de : 648 298 €


On peut donc considérer dans cette situation que le préjudice pour la famille du salarié décédé s’élève alors à 576 298 € (648 298 € – 72 000 €).


A cela, il faudra ajouter les revalorisations annuelles des rentes éducation.


Plus la rémunération du salarié est faible et plus il a d’enfants, plus le préjudice réel sera important.

Dans ces conditions, et dans l’intérêt des enfants orphelins, une saisie de la juridiction prud’homale pour « désaccord avec le montant des garanties décès » ne serait-elle pas justifiée ?


C'est possible. Et elle aurait peut-être toutes les chances d’aboutir.


En effet, les juges pourraient s'inspirer d'une récente jurisprudence (Cass. Soc. n°679 du 17/04/2019) qui donne raison à une veuve en désaccord avec le montant du capital décès versé par l’organisme assureur couvrant insuffisamment les risques garantis par la convention collective de l’entreprise. « La cour en a déduit qu’une faute avait été commise dans la souscription d’une assurance ne garantissant pas le paiement d’un capital décès correspondant aux stipulations de la convention collective et que l’employeur devait indemniser le préjudice en résultant ».

De surcroît, il faut souligner que si l’entreprise est condamnée, l’Urssaf se chargera également de réclamer sur ces sommes les charges sociales correspondantes (Art. L136-1-1 CSS).


Une indemnisation forcée qui mettrait sans doute en difficulté de nombreuses entreprises, notamment les « start-up » car elles ont peu de réserves financières et sont hélas, souvent, mal accompagnées pour appréhender ces sujets.


Sans forcément aller jusqu’à l’illustrer par un cas de décès, il faut noter également que ce risque de contentieux est aujourd’hui accentué par les ordonnances Macron sur le plafonnement des indemnisations prud'homales.

En effet, les salariés ayant une faible ancienneté ont maintenant peu d’intérêt à aller aux prud’hommes, sauf s’il s’agit de demandes non concernées par les barèmes. Voilà qui incite les avocats de salariés à aller sur des terrains plus techniques, afin de réussir à pour contrer ces nouveaux barèmes d’indemnisation. Une des failles est de regarder du côté des conventions collectives appliquées. On peut considérer cela comme un effet pervers des ordonnances Macron.

Pour en savoir plus sur les risques liés au mauvais choix de convention collective, lisez l’article => Peut-on supprimer le risque d'un mauvais choix de convention collective ? 🔗

Comments


bottom of page